
Il existe une île que les cartes ignorent.
Une île où les arbres glissent sur l’eau, où les ancêtres veillent, où la vérité se dérobe comme une brume chaude.
Motu’ora n’est pas un lieu. C’est un passage.
Dès la passe et les récifs franchis, l’eau devint d’un tel calme et d’une telle transparence que le sable doré et les poissons semblaient à portée de main.
D’innombrables oiseaux virevoltaient au-dessus des navires. De toutes tailles, de toutes couleurs, ils se posaient pour siffler, pépier, caqueter, dans les branches des Vaks. Les moins farouches s’approchaient même, jusqu’à se poser sur le pont. Puis ils s’envolaient dans de grands mouvements de plumes chatoyantes, lorsque les enfants les poursuivaient en riant.
Pour la première fois depuis dix années, les Oriliens revenaient sur leur île et contemplaient un paysage différent de cet horizon qui les fuyait chaque jour.
Face à eux, la mangrove recouvrait une moitié du rivage, tandis que, séparées par une rivière, de larges plages de sable fin s’étalaient de l’autre côté. Derrière, poussait une épaisse jungle qui gravissait les pentes de la montagne, jusqu’au cône pierreux d’un ancien volcan.
Les navires avancèrent en direction de la montagne, tant que leur tirant d’eau le leur permettait. Sur l’eau du lagon, si pure et limpide, ils semblaient suspendus dans le vide.